Lettre d’actualité – Urbanisme Aménagement Environnement -Septembre 2018

Tessier Avocat

Lettre d’actualité juridique
Urbanisme, Aménagement, Environnement
Septembre 2018
L’été caniculaire que l’on vient de vivre a été riche en soubresauts juridiques et les droits de l’urbanisme, de l’aménagement et de l’environnement n’ont pas échappé à ces évolutions !

Faisons ensemble un point sur l’actualité législative, réglementaire et jurisprudentielle de ces sujets.

Bonne lecture !

Valentine Tessier
Avocat à la Cour

Actualité législative

Loi “ESSOC”
Approbation de la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un Etat au service d’une société de confiance : Quels impacts sur le droit de l’urbanisme ?

La loi ESSOC comporte 2 piliers, faire confiance et faire simple et modifie à plusieurs égards le droit de l’urbanisme.

Est notamment créée, à titre expérimental, une nouvelle procédure juridictionnelle novatrice permettant au juge administratif d’apprécier la régularité d’une décision administrative non réglementaire, prise dans le cadre d’opérations complexes.

Désormais, les auteurs ou les bénéficiaires de telles décisions pourront, dans un délai de trois mois à compter de leur notification, demander au juge de vérifier rapidement la légalité externe de ces décisions, qui ne pourra plus être contestée par la suite.

La saisine du tribunal administratif suspendra l’examen des éventuels recours dirigés contre cette décision, à l’exclusion des demandes en référé. La demande est rendue publique dans des conditions permettant à toute personne ayant intérêt à agir d’intervenir à la procédure.

Le tribunal devra se prononcer dans un délai fixé par voie réglementaire, sur tous les moyens de légalité externe qui lui seront soumis. Il pourra soulever d’office toute autre motif d’irrégularité de la décision.

La décision en appréciation de régularité du tribunal ne sera pas susceptible d’appel.

Si le tribunal constate la régularité de la procédure, aucun moyen de légalité externe ne pourra plus être invoqué à l’encontre de la décision, que ce soit par voie d’action ou par voie d’exception.

De son côté, par dérogation à l’article L. 242-1 du code des relations entre le public et l’administration, l’autorité administrative pourra retirer ou abroger la décision en cause si elle estime qu’elle est illégale, à tout moment de la procédure et jusqu’à l’expiration d’un délai de deux mois suivant la notification de la décision du tribunal.

Trois domaines d’expérimentation pour commencer : les décisions relevant du Code de l’expropriation, celles relevant du Code de l’urbanisme et celles relevant du régime de déclaration d’insalubrité des immeubles.

Les décisions concernées devront être précisées par un décret en Conseil d’Etat, qui désignera également le ressort des 4 Tribunaux administratifs compétents pour cette expérimentation.

* Est également créée, à titre expérimental, une procédure de rescrit qui permettra aux porteurs de projet d’obtenir de l’Administration, dans un délai de 3 mois, une réponse motivée et opposable sur l’application d’un certain nombre de règles en matière de fiscalité de l’urbanisme (versement pour sous-densité de construction, taxe d’aménagement, redevance d’archéologie préventive, taxe bureaux en Île-de-France, redevances des Agences de l’eau).

Cette expérimentation sera testée sur les projets les plus importants, dont la surface taxable est supérieure à 50 000 m².

* Enfin, la loi ESSOC valide la création d’un “permis de faire”, longuement évoqué ces derniers mois, en autorisant le Gouvernement à prendre deux Ordonnances.

Une première Ordonnance,  à prendre dans un délai de 3 mois, pour prendre toute mesure relevant du domaine de la loi visant à faciliter la réalisation de projets de construction et à favoriser l’innovation :

– d’une part, en fixant les conditions dans lesquelles le maître d’ouvrage de bâtiments peut être autorisé, dans l’attente de l’entrée en vigueur de l’ordonnance relative au permis de faire en tant que tel, à déroger à certaines règles de construction sous réserve qu’il apporte la preuve qu’il parvient, par les moyens qu’il entend mettre en œuvre, à des résultats équivalents à ceux découlant de l’application des règles auxquelles il est dérogé et que ces moyens présentent un caractère innovant ;

– d’autre part, en fixant les conditions dans lesquelles l’atteinte de ces résultats devra être contrôlée avant le dépôt de la demande d’autorisation d’urbanisme, puis, dans un second temps, à l’achèvement du bâtiment.

Une seconde Ordonnance, à prendre dans un délai de dix-huit mois, pour fixer toute mesure relevant du domaine de la loi visant à faciliter la réalisation de projets de construction :

– d’une part, en prévoyant la possibilité de plein droit pour le maître d’ouvrage de bâtiments de satisfaire à ses obligations en matière de construction s’il fait application de normes de référence ou s’il apporte la preuve qu’il parvient, par les moyens qu’il entend mettre en œuvre, à des résultats équivalents à ceux découlant de l’application des normes de référence et en fixant les modalités selon lesquelles cette preuve est apportée avant le dépôt de la demande d’autorisation d’urbanisme et celles selon lesquelles les résultats atteints sont contrôlés après l’achèvement du bâtiment ;

– d’autre part, en adoptant une rédaction des règles de construction applicables propre à éclairer, notamment par l’identification des objectifs poursuivis, le maître d’ouvrage sur les obligations qui lui incombent et qu’il respecte selon l’une des modalités prévues.

L’objectif derrière ces deux Ordonnances ? Autoriser les maîtres d’ouvrage à déroger à certaines règles de construction, à condition de prouver que les moyens mis en œuvre permettront d’atteindre des résultats équivalents. Une précision : ces moyens devront présenter « un caractère innovant ».

Actualité réglementaire

Évaluation environnementale : Un décret modifie la nomenclature 

Décret n° 2018-435 du 4 juin 2018
Ce décret, pris en application de la loi n°2018-148 du 2 mars 2018, a procédé à de nouvelles modifications de la nomenclature des projets soumis à évaluation environnementale, en prenant en compte la décision du Conseil d’Etat du 8 décembre 2017 (CE, n° 404391) qui avait supprimé, sur le fondement du principe de non-régression du droit de l’environnement, une partie du contenu de la rubrique n° 44 « Équipements sportifs, culturels ou de loisirs et aménagements associés » de la nomenclature.
L’objectif de ce décret est de réduire encore le nombre de projets soumis à évaluation environnementale systématique.
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Evolutions du contentieux de l’urbanisme
Décret n° 2018- 617 du 18 juillet 2018

Ce décret modifie le Code de justice administrative, pour ce qui concerne le désistement d’office et la procédure d’appel. Il modifie également le code de l’urbanisme en ce qui concerne le contentieux de l’urbanisme.

Plus précisément, d’une part, le décret modifie, d’une part, le Code de justice administrative en créant une obligation, applicable à l’ensemble des contentieux devant les juridictions administratives, de confirmation, sauf en cas de pourvoi en cassation, du maintien de la requête au fond après le rejet d’un référé-suspension pour défaut de moyen sérieux.
Il prolonge également jusqu’au 31 décembre 2022 la suppression du degré d’appel pour certains contentieux en urbanisme.

D’autre part, le texte modifie les règles applicables au contentieux de l’urbanisme, à plusieurs égards:

  • il modifie les mentions obligatoires dans les autorisations de construire;
  • il élargit le champ de l’obligation de notification des requêtes en remplaçant les termes précis utilisés jusqu’alors par la formule “d’une décision relative à l’occupation ou l’utilisation du sol régie par le présent code“, beaucoup plus large et incluant les documents d’urbanisme ;
  • il réduit de un an à six mois du délai à compter duquel il n’est plus possible de demander l’annulation de l’autorisation de construire lorsque la construction est achevée ;
  • il renforce le mécanisme de cristallisation des moyens en limitant à une durée de 2 mois après la communication du premier mémoire en défense la possibilité de soulever de nouveaux moyens,
  • il fixe un délai de jugement de 10 mois pour certaines autorisations de construire ;
  • il impose en outre la production des pièces démontrant l’intérêt à agir (titre de propriété, statuts de l’Association, etc)
  • il prévoit enfin la délivrance d’un certificat de non-recours par les juridictions.
Le texte est entré en vigueur le lendemain de sa publication au journal officiel.
Toutefois, les dispositions relatives au désistement d’office en cas de rejet de la demande en référé, de même que celles relatives à l’impossibilité de soulever des moyens nouveaux 2 mois après la communication du premier mémoire en défense, ainsi que celles portant sur le délai de jugement de 10 mois, ne s’appliqueront qu’aux requêtes enregistrées à compter du 1er octobre prochain.
De même, les articles R. 600-1, R. 600-3 et R. 600-4 du même code ne seront applicables qu’aux requêtes dirigées contre des décisions intervenues après le 1er octobre 2018.
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Projet de décret relatif à l’Autorité environnementale 

Projet en consultation jusqu’au 28 juillet dernier

Le projet de décret soumis à la consultation prévoit de réformer l’Autorité environnementale compétentes pour les projets. Plus précisément, il prévoit de confier aux Missions régionales d’autorité environnementale (MRAe) la compétence, en lieu et place du Préfet de Région, pour rendre des avis sur les études d’impact de ces projets.En revanche, l’examen au cas par cas des projets pour savoir si ces derniers doivent ou non être soumis à étude d’impact continueront à être de la compétence dudit Préfet.
Le 11 juillet dernier, néanmoins, l’Autorité environnementale nationale a donné un avis très négatif sur ce projet de décret, considérant que le texte est très complexe, voire illisible, sans apporter la sécurité juridique attendue.
Il conviendra donc d’être vigilant sur le texte qui sera définitivement édicté dans les prochaines semaines.
Projet de décret relatif à la protection des biotopes, habitats naturels 
Projet en consultation jusqu’au 19 Septembre 2018
En application de l’article L. 411-1 du code de l’environnement, ce projet de décret fixe les modalités d’élaboration des arrêtés préfectoraux de protection des habitats naturels et étend le champ d’application des arrêtés de protection des biotopes à certains sites bâtis artificiels.

Projet de décret sur l’évaluation environnementale des documents d’urbanisme 

Projet en consultation jusqu’au 12 octobre 2018
Dans le prolongement de la décision du Conseil d’Etat du 19 juillet 2017 (Pour lire notre brève sur cette décision, c’est ici), le Ministère de la Transition écologique soumet à consultation publique un projet de décret dont l’objet est d’élargir le champ d’application de l’évaluation environnementale des documents d’urbanisme, afin de couvrir les procédures de modification et de mise en compatibilité. Le projet de texte a ainsi pour objectif de mettre en place un nouveau dispositif d’examen au cas par cas  pour les cartes communales et les procédures d’évolution des PLU et SCOT.

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Actualité jurisprudentielle

Application de la loi littoral
Loi littoral et notion de continuité des espaces remarquables
(CE, 30 mai 2018, n° 408068)

Pour rappel, l’ancien article L. 146-6 du Code de l’urbanisme (désormais cofifié à l’article L. 121-8 de ce Code) disposait que : “L’extension de l’urbanisation doit se réaliser soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l’environnement (…)”.

Dans cette décision relative à l’appréciation de la légalité de l’approbation d’un Plan local d’urbanisme, la Haute juridiction souligne que, pour apprécier si des parcelles présentent le caractère de site ou paysage remarquable à protéger au sens du premier alinéa de l’article L. 146-6 du code de l’urbanisme, l’autorité compétente ne peut se fonder sur leur seule continuité avec un espace présentant un tel caractère, sans rechercher si elles constituent avec cet espace une unité paysagère justifiant dans son ensemble cette qualification de site ou paysage remarquable à préserver.

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Annulation partielle de PLU
(CAA Marseille, Commune du Lavandou, n°16MA003780)

Par cet arrêt intéressant, la Cour administrative d’appel de Marseille annule partiellement le PLU de la Commune du Lavandou, sur le fondement des dispositions du Code de l’urbanisme issues de la loi littoral.

La Cour précise d’abord qu’il résulte de ces dispositions que les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les zones déjà urbanisées, caractérisées par une densité significative des constructions, mais qu’aucune construction ne peut en revanche être autorisée, même en continuité avec d’autres constructions, dans les zones d’urbanisation diffuse éloignées des agglomérations.

Elle précise encore que ces dispositions autorisent les auteurs du plan local d’urbanisme à délimiter une zone, dans laquelle est possible une extension de l’urbanisation de faible ampleur intégrée à l’environnement par la réalisation de hameaux nouveaux intégrés à l’environnement, se définissant comme un petit nombre de constructions de faible importance, proches les unes des autres et formant un ensemble dont les caractéristiques et l’organisation s’inscrivent dans les traditions locales.

En l’espèce, faisant application de ces dispositions, la Cour a écarté les dispositions du schéma de cohérence territoriale Provence-Méditerranée, lequel couvre 15 communes littorales, dont celle du Lavandou, les considérant comme incompatibles avec les dispositions susmentionnées.

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Modalités d’extension de l’urbanisation dans une Commune littorale 
(CE, 11 juillet 2018, n° 410084)
Dans cette décision, portant sur un permis de construire une maison individuelle, le Conseil d’Etat apprécie le critère de continuité avec les constructions existantes sur le territoire d’une Commune littorale.

Le Tribunal administratif avait considéré que la seule proximité immédiate du projet de construction avec un camping suffisait à permettre de considérer que ce projet était situé en continuité avec l’agglomération.

Le Conseil d’Etat censure alors ce jugement en reprochant aux juges du fond de n’avoir pas examiné si les constructions soumises à autorisation qui se trouvent dans ce camping assuraient la continuité avec l’ensemble des constructions avoisinantes et si la construction projetée était elle-même dans la continuité des constructions du camping.

En d’autres termes, la seule proximité avec un camping ne suffit pas à permettre de considérer que le projet est situé dans la continuité de l’agglomération.

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Autorisation unique et Autorisation environnementale
(CE, Avis, 26 juillet 2018, n° 416831) 

Le Conseil d’Etat est venu apporter des précisions sur l’application dans le temps des dispositions relatives à l’ancienne “autorisation unique”, issues de l’Ordonnance n°2014-355 du 20 mars 2014, et de celles relatives à l’autorisation environnementale, issue de l’Ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017.

Précisément, par le biais d’une question préjudicielle, le Tribunal administratif de Lille avait interrogé le Conseil d’Etat sur les règles de procédure applicables à ces autorisations.

Sur les règles de procédure contentieuse, tout d’abord, le Conseil d’Etat précise alors que l’autorisation environnementale, au même titre que l’autorisation unique, est soumise à un contentieux de pleine juridiction. En d’autres termes, le juge doit apprécier le respect des règles de procédure régissant la demande d’autorisation, au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de la délivrance d’autorisation. En revanche, les règles de fond doivent être appréciées à la date à laquelle le juge statue.

Néanmoins, s’il estime que l’autorisation unique a été délivrée en méconnaissance des règles de procédure applicables à la date de sa délivrance, le juge peut, grâce à ses pouvoirs de plein contentieux, prendre en compte la circonstance, appréciée à la date à laquelle il statue, que de telles irrégularités ont été régularisées. La seule réserve ? Que ces irrégularités n’aient pas nui à l’information du public.

Ensuite, le Conseil d’Etat rappelle que l’autorisation unique valait permis de construire, ce qui n’est pas le cas de l’actuelle autorisation environnementale. Il souligne alors que l’autorisation unique continue de produire ses effets en tant qu’elle vaut permis de construire et ce, bien qu’elle soit désormais regardée comme une autorisation environnementale. Sur cette partie de l’autorisation, le juge devra statuer comme juge de l’excès de pouvoir.

Enfin, le Conseil d’Etat apporte des précisions sur les modalités de contrôle des capacités techniques et financières du bénéficiaire de l’autorisation environnementale, en distinguant deux hypothèses :

– d’une part, lorsque le juge se prononce alors que l’installation n’a pas encore été mise en service, et que la méconnaissance de règles de fond est soulevée, il lui appartient de vérifier la pertinence des dires du pétitionnaires
– d’autre part, lorsqu’il se prononce après la mise en service de l’installation, le juge doit vérifier la réalité et le caractère suffisant des capacités techniques et financières du pétitionnaire voire de l’exploitant si l’autorisation a été transférée.

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Permis de construire
Les éoliennes, même non soumises à permis de construire, doivent respecter le droit de l’urbanisme (CE, 14 juin 2018, n° 409227)
Dans cette décision portant sur la contestation du décret n° 2017-81 du 26 janvier 2017 relatif à l’autorisation environnementale, le Conseil d’Etat a jugé que si l’article R. 425-29-2 du code de l’urbanisme dispense les projets d’installation d’éoliennes terrestres soumis à autorisation environnementale de l’obtention d’un permis de construire, il n’a, en revanche, ni pour objet ni pour effet de dispenser de tels projets du respect des règles d’urbanisme qui leurs sont applicables.

Par conséquent, la Haute juridiction a validé ces dispositions en considérant qu’elles ne méconnaissaient pas le principe de non-régression posé par l’article L. 110-1 du code de l’environnement.

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Permis de construire et Plan de prévention des risques naturels
(CE, 20 juin 2018, n° 412690)
Pour rappel, aux termes des dispositions de l’article L. 562-1 du Code de l’environnement, les PPRN ont pour objet, notamment : “3° De définir les mesures de prévention, de protection et de sauvegarde qui doivent être prises, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, par les collectivités publiques dans le cadre de leurs compétences, ainsi que celles qui peuvent incomber aux particuliers”.

L’article L. 562-4 de ce code ajoute que les PPRN constituent des servitudes d’utilité publique devant être annexées, à ce titre, au Plan local d’urbanisme.

Le Conseil d’Etat confirme alors qu’il résulte de la combinaison de ces dispositions que, « dans les zones délimitées par un plan de prévention des risques naturels prévisibles, les prescriptions auxquelles un tel plan subordonne une construction en application des 1° et 2° du II de l’article L. 562-1 de ce code s’imposent directement aux autorisations de construire ». Ainsi, ces autorisations ne pourront pas être accordées si elles méconnaissent ces prescriptions.

En revanche, le Conseil d’Etat considère qu’il n’en va de même, s’agissant des mesures incombant aux particuliers, que lorsque leur réalisation a été rendue obligatoire dans les conditions prévues au III de l’article L. 562-1 du Code de l’urbanisme.

Si leur réalisation n’a pas été rendue obligatoire dans ce cadre, le Conseil d’Etat précise alors que “ces mesures font seulement partie des éléments que l’autorité chargée de délivrer les autorisations de construire peut, en fonction de leur objet, prendre en considération pour apprécier le respect du règlement national d’urbanisme ou des dispositions ayant un objet similaire d’un plan local d’urbanisme ou d’un document d’urbanisme en tenant lieu“.

Dans ce dernier cas, la circonstance que le projet ne met pas en œuvre les mesures de prévention préconisées par le plan de prévention des risques naturels prévisibles ne fait pas, par elle-même, obstacle à ce que le permis de construire puisse légalement être accordé.

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Permis de construire obtenu par fraude et délai de retrait au delà d’un an
(CE, 16 août 2018, n°412663)
Dans cette décision, le Conseil d’Etat rappelle qu’un permis ne peut faire l’objet d’un retrait, une fois devenu définitif, qu’au vu d’éléments, dont l’administration a connaissance postérieurement à la délivrance du permis, établissant l’existence d’une fraude à la date où il a été délivré. La caractérisation de la fraude résulte de ce que le pétitionnaire a procédé “de manière intentionnelle à des manoeuvres de nature à tromper l’administration sur la réalité du projet dans le but d’échapper à l’application d’une règle d’urbanisme“. En d’autres termes, une simple information erronée ne suffit pas à regarder le pétitionnaire comme s’étant livré à des manoeuvres destinées à tromper l’administration.

Cette décision est intéressante également, en ce que le Conseil d’Etat confirme qu’un acte obtenu par fraude peut être retiré à tout moment. Surtout, il précise, s’il en était besoin, que le délai raisonnable d’un an (voir CE, 13 juillet 2016, n° 387763 et CE, 9 mars 2018, n° 401386, jugeant que la légalité d’une décision administrative ne peut être contestée au-delà d’un délai raisonnable d’un an, et ce, alors même que les décisions entreprises n’indiquaient pas les voies et les délais de recours) ne saurait être appliqué par le juge dans le cas d’une fraude.

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Affichage du permis de construire et constat d’huissier 
(CAA Bordeaux, 28 août 2018, n° 16BX00487)
L’existence d’un constat d’huissier ne permet pas de suppléer le manque de visibilité des mentions obligatoires figurant sur le panneau d’affichage du permis de construire.

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Contentieux
Régularisation d’un document d’urbanisme en cours d’instance et conditions de la contestation de l’acte de régularisation
(CE, 29 juin 2018, n° 395963)
Le Conseil d’Etat pose ici les conditions, mais également les limites de contestation de l’acte de régularisation dans le cadre de l’instance ayant donné lieu au sursis à statuer.

Il considère ainsi qu’il résulte de l’article L. 600-9 du code de l’urbanisme que les parties à l’instance ayant donné lieu à la décision de sursis à statuer en vue de permettre la régularisation de l’acte attaqué ne peuvent contester la légalité de l’acte pris par l’autorité administrative en vue de cette régularisation que dans le cadre de cette instance. En revanche, elles ne sont pas recevables à présenter devant le tribunal administratif une requête distincte tendant à l’annulation de cet acte.

A l’appui de la contestation de l’acte de régularisation, les requérants pourront invoquer des vices affectant sa légalité externe et soutenir qu’il n’a pas pour effet de régulariser le vice que le juge a constaté dans sa décision avant-dire droit. Aucun autre moyen ne pourra en revanche être soulevé, qu’il s’agisse d’un moyen déjà écarté par la décision avant-dire droit ou de moyens nouveaux, à l’exception de ceux qui seraient fondés sur des éléments révélés par la procédure de régularisation.

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Régime contentieux des actes créateurs de droit 
(CE, Avis, 26 juillet 2018, n° 419204)
Dans cette affaire, le Tribunal administratif de Dijon avait posé une question préjudicielle à la Haute juridiction, rédigée de la manière suivante : “Lorsque le retrait d’une décision créatrice de droits, pris avant l’expiration du délai de quatre mois, a été annulé par le juge administratif alors qu’il aurait pu être légalement pris, l’administration dispose-t-elle, au regard du principe de légalité, compte tenu des intérêts généraux dont elle a la charge et dans le respect de l’autorité absolue de la chose jugée, d’un nouveau délai de quatre mois, à compter de la notification du jugement d’annulation, pour reprendre une décision de retrait “?

A cette question, le Conseil d’Etat répond que, lorsqu’une décision créatrice de droits est retirée et que ce retrait est annulé, la décision initiale est rétablie à compter de la date de lecture de la décision juridictionnelle prononçant cette annulation.

En revanche, une telle annulation n’a pas pour effet d’ouvrir un nouveau délai de quatre mois pour retirer la décision initiale, alors même que celle-ci comporterait des irrégularités pouvant en justifier légalement le retrait.

Toutefois, lorsqu’une décision créatrice de droits a été retirée dans le délai de recours contentieux puis rétablie à la suite de l’annulation juridictionnelle de son retrait, le délai de recours contentieux court à nouveau à l’égard des tiers à compter de la date à laquelle la décision créatrice de droits ainsi rétablie fait à nouveau l’objet des formalités de publicité qui lui étaient applicables ou, si de telles formalités ne sont pas exigées, à compter de la date de notification du jugement d’annulation.

Enfin, le Conseil d’Etat précise que, lorsque la décision créatrice de droits remise en vigueur du fait de l’annulation de son retrait par le juge a pour auteur l’une des autorités mentionnées à l’article L. 2131-2 du CGCT (en ce compris toutes les décisions de permis de construire) il appartient à cette autorité de transmettre cette décision au représentant de l’Etat dans le département dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement d’annulation. Le préfet dispose alors de la possibilité de déférer au tribunal administratif la décision ainsi remise en vigueur du fait de cette annulation s’il l’estime contraire à la légalité.

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Expropriation
Appréciation de l’utilité publique d’un projet à l’aune du droit de l’environnement
(CAA Marseille, 25 juin 2018, n° 17MA02587)
Dans cet arrêt, le juge administratif devait examiner la régularité d’une déclaration d’utilité publique relative à des travaux nécessaires à la réalisation d’une voie de contournement.

Après avoir confirmé l’intérêt général de l’opération, le juge examine l’utilité publique du projet par rapport aux atteintes qu’il causera à l’environnement.
A cet égard, le juge relève que les mesures compensatoires prévues par l’étude d’impact avaient été fixées par un arrêté préfectoral de dérogation à la destruction d’espèces protégés qui, depuis, avait été annulé.
Cette annulation rendant impossible la mise en oeuvre des mesures compensatoires prévues, la Cour considère alors que le projet de contournement portera une atteinte importante à l’environnement faunistique qui ne saurait être relativisée.

Par conséquent, la Cour annule l’arrêté de DUP, considérant que l’inconvénient environnemental dui projet est de nature à retirer au projet son caractère d’utilité publique.

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Principe de prévention et déclaration d’utilité publique
(CE, 9 juillet 2018, n° 410917)
Par cette décision, le Conseil d’Etat a rejeté le recours formé contre le décret déclarant d’utilité publique les travaux nécessaires à la réalisation de la ligne 18 du Réseau transport public du Grand Paris Express.

Sa lecture n’est pas inintéressante sur l’application que la Haute juridiction a fait du principe d’action préventive (autrement intitulé principe de prévention), consacré par l’article L. 110-1 du Code de l’environnement. Pour rappel, ce principe “implique d’éviter les atteintes à la biodiversité et aux services qu’elle fournit ; à défaut, d’en réduire la portée ; enfin, en dernier lieu, de compenser les atteintes qui n’ont pu être évitées ni réduites, en tenant compte des espèces, des habitats naturels et des fonctions écologiques affectées“. Surtout, il est expressément indiqué que ce principe “doit viser un objectif d’absence de perte nette de biodiversité, voire tendre vers un gain de biodiversité“.

En l’occurrence, le Conseil d’Etat analyse ce principe au regard du Code de l’expropriation et considère que le tracé retenu, de même que les mesures prévues pour compenser les incidences sur l’environnement sont de nature à réduire significativement ces inconvénients.

Pour ce motif, et bien que rien ne soit dit sur l’absence de gain de biodiversité, voire sur la perte de biodiversité due à ces travaux, le Conseil d’Etat considère que le principe de prévention est respectée par la déclaration d’utilité publique.

On peut ainsi y voir une diminution de la portée du principe de prévention par rapport à ce qu’on aurait pu en attendre.

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Autres actualités 

Réponses ministérielles

** Cimetières privés et permis de construire 

La question posée était la suivante : la construction des caveaux, tombeaux et monuments funéraires dans un cimetière privé est-elle dispensée de l’obtention d’un permis de construire ou du dépôt d’une déclaration préalable en application de l’article R. 421-2 du code de l’urbanisme ?

A cette question, le Ministre de l’Intérieur répond que le code de l’urbanisme dispense en effet, en principe, de toute procédure certaines constructions en raison de leur nature ou de leur très faible importance, en ce compris « les caveaux et monuments funéraires situés dans l’enceinte d’un cimetière ».

Le fait que le texte ne donne aucune précision sur la nature du cimetière permet d’en déduire que ces dispositions s’appliquent également aux cimetières privés. (Rép. min.14 juin 2018, Q. n° 04459, JO Sénat p. 1864)

Pour aller plus loin
** Un Guide méthodologique sur l’Obligation réelle environnementale (ORE)

Au mois de juin dernier, le Ministère de la transition écologique et le CEREMA ont publié ensemble un guide méthodologique sur l’Obligation Réelle Environnementale (ORE).

Ces ORE permettent en effet à tout propriétaire d’un bien immobilier de mettre en place une protection environnementale attachée à ce bien. Cette protection peut prendre la forme d’un contrat librement consenti entre le propriétaire et un cocontractant qui peut-être une Collectivité publique, un Etablissement public ou encore une personne privée agissant pour la protection de l’environnement.

Bien entendu, les engagements pris dans le cadre d’un tel contrat doivent avoir pour objet de favoriser la biodiversité.

Ce dispositif foncier, créé par la loi sur la Reconquête de la biodiversité, permettait la constitution d’un outil de protection volontaire de l’environnement novateur et intéressant.

Toutefois, à ce jour, ce dispositif n’a pas rencontré le succès escompté.

Ce guide pourrait permettre qu’il en aille autrement !

Pour consulter le guide, cliquez ici !

** A venir dans la prochaine Lettre d’actualité, une analyse du projet de loi ELAN, dont le texte doit passer en Commission Mixte Paritaire aujourd’hui, 19 septembre 2018

** Prochaine Intervention de Valentine TESSIER

“Le nouvel aménagement urbain issu de la loi ELAN”, Cycle Aménagement et Urbanisme

Pour voir le programme, c’est ici !

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